Également appelée "Les Platanes", cette splendide demeure construite, à la charnière entre le XIX^ème et le XX^ième siècles par Valère Carpentier et son épouse, Marie Huybrechts, est située à Renaix (Ronse), aux confins entre la Flandre Orientale et le Hainaut, à 15 minutes de Tournai et 30 minutes de Gand. Ce joyau Art Nouveau est serti dans un écrin de verdure, parc arboré de trois hectares, également dessiné par Horta, dont les chemins et sentiers s'enroulent, littéralement, en arabesques, autour de l'immeuble. Les très beaux arbres centenaires sont d'essences variées : hêtres, gingko, tulipier de Virginie, araucaria, platanes, séquoia, ifs, peupliers, houx, châtaigners, mélèze, pin noir, bouleaux, lauriers, rhododendrons, magnolia, azalée du Japon, etc.

Malgré son occupation, pendant la Deuxième Guerre Mondiale, successivement par les troupes allemandes, anglaises, puis belges, et le pillage dont elle fit l'objet, cette demeure reste, à la fois la plus remarquable et la plus aboutie des "campagnes" dessinées par Horta. Contrairement aux autres réalisations "rurales" de Horta, celle-ci se caractérise par l'intégration d'éléments du plus pur style Art Nouveau. À l'extérieur, Horta associé la finesse des sgraffites à une riche palette de pierres, de briques et de structures métalliques. Il a particulièrement soigné les façades, variées à souhait. Chaque angle de vue est différent de tous les autres. De l'ensemble se dégage une impression à la fois de robustesse et de rafinement. De plus, la multiplication des pentes de la toiture et l'importance de ses débords lui confèrent un aspect oriental.

L'intérieur, s'il apparaît plus dépouillé que la plupart des réalisations citadines de Horta, est néanmoins nettement marqué de l'empreinte du maître : cheminées, boiseries, placards, passe-plat, jusqu'aux poignées de porte. Pour agrémenter le tout, Horta s'est assuré de la collaboration d'illustres artistes de son temps avec lesquels il avait coutume de travailler. C'est ainsi que le patio est orné de sgraffittes réalisés par Adolphe Crespin, tandis que la somptueuse réception abrite une toile monumentale d'Émile Fabry intitulée Hymne de reconnaissance devant le charme de la nature, et le salon une composition symboliste d'Albert Ciamberlani.

Dans le cadre de ce projet, Horta s'est particulièrement intéressé aux espaces en relation directe avec l'extérieur. À l'instar de ce qu'il refit plus tard pour l'hôtel Max Hallet, l'intérieur ouvre sur le jardin. L'agencement des pièces s'écarte sensiblement du plan intériorisé typique du style Art Nouveau où l'environnement extérieur influençait peu la forme de l'immeuble. Contrairement aux intérieurs d'acier et de verre délicatement éclairés des maisons de ville, l'intérieur de la villa Carpentier laisse pénétrer la lumière du jour. Les murs encadrent les perspectives donnant sur la nature environnante. La toile de Fabry apparaît du reste comme un écho plastique au merveilleux jardin qu'encadrent les fenêtres.

Les pierres assez brutes des murs extérieurs, combinées à une maçonnerie en briques rouges inégales confèrent à l'édifice un caractère minéral. Toutefois l'ensemble est difficilement classable. Il ne rappelle en rien l'architecture régionale et ne constitue pas davantage une transposition "campagnarde" pure et simple du style citadin de Horta. Pourtant, outre les volutes très évidentes de la façade, les éléments Art Nouveau tels que appliques extérieures en bronze, pierres taillées, colonnes en fonte, vitraux, châssis, poignées de porte, marbres des cheminées, placards, meubles intégrés, mosaïques et autres ferronneries d'art sont présents en abondance. D'autres, tel le fronton de la façade sud, qui coupe, en la dépassant, la corniche en surplomb, sont presque d'inspiration baroque.

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